jeudi 3 mai 2018

3 mai

La pluie tombe abondamment comme elle le ferait sur les pentes d’une montagne si Binh-Dû s’y trouvait, heureux d’avoir quitté la ville, sous ses pieds il contacterait à nouveau la roche, la terre meuble, les herbes et les fleurs innombrables, dans sa poitrine son cœur battrait plus fort, joyeux par l’effort et de l’espace, il renverserait la tête en arrière pour sentir le crépitement des gouttes d’eau sur sa peau, il serait trempé malgré le poncho imperméable, il rirait de l’inconfort, il se féliciterait d’être parti.
Un escargot en plein milieu de l’allée bitumée avance en dandinant sa coquille fragile, d’un beau jaune pâle, d’une unique spirale, entre deux doigts Binh-Dû le saisit et le dépose plus à l’abri dans le gazon. Un corbeau crève par en-dessous le sac en plastique d’une poubelle publique, sur le trottoir se déversent des reliefs de nourriture synthétique dont l’oiseau se contente. La déchirure du poncho s’agrandit sous l’encolure. De quoi passer la main, extraire un organe, changer de corps et de monde.